Je ne suis pas “TA” jolie

Publié le 19 mars 2015 | Humeurs

Salut les chatons,

Ouh qu’il est dur à écrire c’t’article. Forcément, on va se fendre un poil moins la trogne que d’habitude.

Mais voilà un sujet qui m’interpelle au plus haut point, même si j’ai du mal à l’aborder tout simplement parce que je sors de ma zone de confort. Croyez-le ou non, mais il est bien plus simple pour moi de vous la causer rouge à lèvres.
Le harcèlement de rue, vous n’avez pas pu passer à côté ces derniers mois. Enfin on en parle. Nombreuses sont les réactions type “bah ouais, moi aussi j’vis ça tous les jours”. Je vais y ajouter la mienne aujourd’hui. Pour peut-être un jour ne plus avoir à entendre “bah arrête, t’es en France c’est quand même tranquille” ou encore “t’énerve pas, c’est un compliment”.

tweet

Non, ce n’est pas normal. Non, ça n’est pas flatteur. Et non, ça n’est pas innocent.
Les beaux jours arrivant, ça reprend de plus belle de mon côté. L’occasion pour moi de profiter du blogounet pour vous en toucher 2 mots.

Concrètement, au quotidien ça donne quoi ?

Bien souvent, le harcèlement de rue se limite à des mots. C’est vrai, mais c’est déjà beaucoup trop. Évidemment, y’a pas mort d’homme, mais j’ai l’impression qu’on se rend pas toujours compte de ce que ça peut engendrer chez une femme comme ressenti.
Mon mec par exemple n’avait aucune idée de tout ça (et dieu sait que c’est quelqu’un de bien, d’attentionné et de très ouvert sur le monde qui l’entoure), je crois qu’il se rendait pas vraiment compte avant d’être avec moi. Ou qu’il pensait pas que ça puisse être aussi récurrent plutôt. Puis il m’a vu rentrer déboussolée, ou l’appeler terrifiée à la sortie du métro. Depuis il veut plus que je rentre seule tard (ou pas tard d’ailleurs), pas super pratique non plus ! Et pas une solution, on est d’accord.

Je crois qu’il ne se passe pas un seul jour sans qu’on vienne m’accoster dans la rue.

Je suis pas du tout en train de me la raconter genre “j’me fais alpaguer tous les 5m dès que j’fous un pied dehors tellement chuis bonnasse”.
Parce que c’est aussi les réactions qu’on peut lire un peu partout, masculines ou non d’ailleurs.
J’espère vraiment que mon message sera bien compris ici.

Probablement que le fait que je sois désormais piétonne augmente ces probabilités. C’est d’ailleurs parfois un peu plus stressant que quand je me trimballais en clio. Les gars se garent pour sortir de leur bagnole, t’attendre, te proposer un café ou de te raccompagner. T’es facilement en contact direct.

Alors tout y passe : on te demande du feu, l’heure ou encore des clopes. On te siffle, on te laisse passer au passage piéton mais visiblement on attend un remerciement plus chaleureux que prévu.
Finalement, le prétexte initial est vite oublié et on passe rapidement aux “compliments”. Et là encore, je mets de gros guillemets. On entend de tout, du “t‘es vraiment très belle” plutôt sympa en apparence (avant qu’il ne devienne beaucoup trop insistant), au complètement décomplexé “t’es bonne”, “mhhh excitante ta jupe”, “joli p’tit cul !”.
Je vous laisse lire le genre de remarques cooloss qu’on rencontre à chaque coin de rue dans cet article. Ça vous paraîtra violent, légèrement vulgaire, moi-même j’ai du mal à les traduire ou les dire à haute voix, mais j’vous assure que c’est comme ça que ça s’passe.

exemple

Et ça, c’est verbal. Je vous parle même pas des mains au cul, dans les cheveux, des mains un peu partout en fait, juste pour avoir un contact physique, ou du gros lourd qui se colle à toi en remuant du bassin ou souffle dans ton cou dans un métro bondé. Pour beaucoup d’entre nous, ça s’appelle le quotidien. 

Nos réactions :

Plusieurs choix s’offrent à nous :

– La gentillesse
Au début tu réponds poliment, tu souris gênée pour pas paraître trop hautaine et l’énerver (cf photo et remarque du genre ci-dessus). Le malaise est bien présent, mais t’essaies de le cacher.
Sauf que bien évidemment, c’est la porte ouverte à toutes les fenêtres et bien souvent interprété comme un “ok, je suis intéressée”.

– L’indifférence
Alors tu prends tes distances quand le “non j’ai pas le temps” n’est pas suffisant, quand le tutoiement est visiblement de rigueur, quand “on peut faire la route ensemble si t’es pressée” s’installe.
Tu finis par te taire, ne plus répondre, accélérer le pas, et bien souvent on passe aux insultes “ah ça, elle le sait qu’elle est belle”, “connasse”, “vous êtes vraiment toutes des putes”. Normal, vous dites ?

– Le rentre-dedans
C’est quitte ou double, certains seront surpris que tu réagisses et calmeront le jeu, d’autres seront encore plus énervés, passeront au stade supérieur et utiliseront ton agressivité en retour pour justifier leur agression.
Personnellement je n’y arrive pas. Mon genre à moi, c’est plutôt : tu me demandes mon sac dans la rue, je te le donne et je rentre chialer chez ma mère. (jte promets, ça craint). J’ai très peur de la violence (physique ou verbale d’ailleurs), je la fuis généralement au maximum, et c’est vraiment un truc que j’dois bosser, au cas où.

Je sais pas, parfois j’voudrais simplement profiter du soleil sur le chemin du taf, continuer de rêvasser à peine sortie de mon lit, réviser mes paroles de Beyoncé, rentrer chez moi un peu plus tard que prévu sans flipper (et sans que mon mec flippe), et surtout pas réfléchir 15 ans à ce que je vais mettre, ou plutôt ce que je peux mettre en fonction de mes trajets du jour. Parce que oui, porter une jupe ne signifie pas avoir terriblement envie de faire l’amour. Première nouvelle.

diglee

L’excellent article de Diglee à lire ICI

Alors, on fait quoi ?

Quand ces gars-là ont décidé d’être con, c’est pour la vie. Et même si le sujet est désormais de moins en moins tabou, on est pas sorties de l’auberge. Les beaux jours sont de retour, et clairement je sens à nouveau cette pression autour de moi. L’objectif étant de ne pas rester emmitouflées sous nos 15 couches de fringues pour éviter de se faire emmerder, qu’est-ce qu’on peut faire ?

– On se fait entendre :
On tente de faire réagir les témoins autour de soi. On parle fort (on crie évidemment si ça va plus loin), on interpelle ses voisins, on va s’assoir à côté de quelqu’un de rassurant.
Ou on réagit si nous aussi on est témoin. Il suffit parfois de la réaction d’une minorité de personnes pour influencer la majorité. Alors peu importe ton degré de musculature, il faut se dire que si toi tu te lèves, quelqu’un te suivra forcément. Et ça peut changer une vie.

– On s’équipe :
Très terre à terre, certainement, mais bien utile. Tout peut tellement aller très vite. Et en cas d’attaque, ça permet de rétablir les chances de survie.
Une bombe lacrymo, légalement c’est pas autorisé (prendra ça en considération qui voudra). Mais surtout : un coup de vent, et c’est toi qui te ramasses tout dans la gueule.
Par contre, il existe des stylos “tactiques” (que vous trouverez facilement en armurerie ou sur internet). Autorisés donc, car leur fonction première est d’être un stylo (ce truc-là écrit vraiment) et ça passe devant un agent de police en cas de contrôle. Ils permettent, lorsqu’on apprend à les utiliser, de se libérer d’une immobilisation, mais aussi d’en faire un accessoire de défense.

– On apprend à se défendre :
Justement, et je vous en parle plus en détails la semaine prochaine en vidéo, mais j’ai participé à une initiation au self-defense.
Clairement, ça m’a changée. Évidemment qu’il faut un peu plus de temps pour intégrer toutes les prises, que ça devienne des réflexes pour le jour où. Mais déjà en une matinée, j’ai pris confiance. J’veux dire par là, que physiquement c’est très utile, mais mentalement aussi je me sens plus apte à riposter. Et on partait de loin croyez-moi.
Des stages existent un peu partout, j’espère que cette vidéo finira de vous convaincre sur l’utilité de la self-defense.

seldefense

Si vous voulez vous faire une première idée de ce que propose Nicolas, c’est ICI

– On en parle autour de soi :
Entre nous, j’avoue que de poser ça sur papier, ça me fout vraiment un coup au moral.
Peut-être que ça vous parlera un peu les meufs (j’espère que non), et que ça vous aidera à vous dire que c’est pas de votre faute (si l’une d’entre vous pense ça, qu’elle arrête tout de suite) et que c’est pas parce que vous êtes sapée de telle ou telle façon qu’on a le droit de vous harceler.
Peut-être que les mecs qui me lisent seront eux aussi sensibilisés.
Peut-être que ça servira pas à grand chose, probablement tu m’diras. Mais j’avais envie besoin.

Alors vous aussi, parlez-en, on ne doit pas céder à la peur. Il faut qu’on se serre les coudes pour que l’espace public soit plus safe pour les femmes (si ce sujet vous parle un peu, j’vous invite à lire Marylène Lieber).
Et pour les plus engagés parmi vous, pourquoi pas passer à l’action. Le collectif “Stop Harcèlement de Rue” propose pas mal d’actions concrètes, ou de simples rencontres pour augmenter leur visibilité et développer des “zones sans relou”.
Leur page Facebook ici.

PP chachaEt évidemment, parlez-m’en en commentaires, je suis très pressée d’avoir vos ressentis sur tout ça, masculins et féminins, et vos réactions à vous si vous en avez qui font mouche à chaque fois.
A lundi pour mon notre initiation au self-defense en vidéo !
Bisous,
Chacha

 

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16 Réponses pour Je ne suis pas “TA” jolie

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